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Fr. Nietzsche - On ne peut pas fonder la connaissance sur les faits de conscience

Par Le 19/03/2020

« Honte à la suffisance de ceux qui prétendent connaître ! […]

Quand dans les choses, sous les choses, derrière les choses, ils retrouvent ce qui, par malheur, ne nous est que trop connu, par exemple notre table de multiplication ou notre logique, ou encore notre vouloir et notre convoitise, comme ils sont heureux, aussitôt ! Car « ce qui est connu est reconnu » : ils sont unanimes à cet égard. Mais les plus circonspects d’entre eux prétendent que le connu tout au moins serait plus facile à reconnaître que ce qui est étranger : il serait par exemple plus méthodique de prendre son point de départ dans le « monde intérieur », depuis les « faits de la conscience », parce que ce serait là le monde mieux connu de nous-mêmes ! Erreur des erreurs !

Le connu, c’est l’habituel, et l’habituel est ce qu’il y a de plus difficile à « reconnaître », c’est-à-dire à considérer en tant que problème, donc en tant qu’étranger, que lointain, que situé « hors de nous ». La grande assurance dont les sciences naturelles font preuve par rapport à la psychologie et la critique des éléments de la conscience […] tient précisément au fait qu’elles prennent la réalité étrangère pour objet : tandis qu’il y a quelque chose de presque contradictoire et d’absurde à vouloir prendre pour objet ce qui n’est pas étranger. »

Friedrich Nietzsche, Le Gai Savoir (1882)

E. Kant - Posséder le "je" dans sa représentation

Par Le 19/03/2020

« Posséder le Je dans sa représentation : ce pouvoir élève l’homme infiniment au-dessus de tous les autres êtres vivants sur la terre. Par-là, il est une personne ; et grâce à l’unité de la conscience dans tous les changements qui peuvent lui survenir, il est une seule et même personne, c’est-à-dire un être entièrement différent, par le rang et la dignité, de choses comme le sont les animaux sans raison, dont on peut disposer à sa guise ; et ceci, même lorsqu’il ne peut pas dire Je, car il l’a dans sa pensée ; ainsi toutes les langues, lorsqu’elles parlent à la première personne, doivent penser ce Je, même si elles ne l’expriment pas par un mot particulier. Car cette faculté (de penser) est l’entendement.

Il faut remarquer que l’enfant qui sait déjà parler assez correctement ne commence qu’assez tard (peut-être un an après) à dire Je ; avant, il parle de soi à la troisième personne (Charles veut manger, marcher, etc.) ; et il semble que pour lui une lumière vienne de se lever quand il commence à dire Je ; à partir de ce jour, il ne revient jamais à l’autre manière de parler. Auparavant il ne faisait que se sentir ; maintenant il se pense. »

Emmanuel Kant, Anthropologie du point de vue pragmatique (1798)

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