La Liberté (partie 2) Justice Loi

Les lois suffisent-elles à établir une société juste ?

Pour qu'une loi soit légitime, nous l'avons vu, il faut qu'elle permette de régler le conflit des libertés. Le but de l'Etat et des lois doit être ainsi la liberté des citoyens. Pourtant, il existe bien des lois que nous jugeons illégitimes, injustes - par exemple, les lois qui instaurent des discriminations. De quel droit peut-on ainsi juger de la validité de la justice et des lois positives ? Suffit-il de s'en référer aux Droits de l'Homme ?

a) Les lois sont-elles toujours légitimes ?

La question de la légitimité de la loi suppose que l’on ait distingué deux sortes de droits. Pour juger de la validité d’une règle, il faut bien des critères, une norme à laquelle la comparer. Ainsi sommes-nous conduits à distinguer d’une part le Droit naturel comme source de cette légitimité, et d’autre part, le Droit positif comme application de ce droit aux situations pratiques, à la réalité.

Le Droit est d’abord une exigence de conformité à une règle sociale. Cette règle se concrétise en un ensemble de Lois qui organisent et régissent un Etat : ce que l’on nomme un Etat de droit. Il s’agit de conventions qui sont établies par la communauté politique pour réguler les échanges, pour garantir la propriété par exemple, pour fixer des règles de conduite (de comportement). Ces conventions sont fixées dans un Code qui devient le référent des décisions de Justice. L’ensemble des lois telles qu’on les applique est ce que l’on nomme le Droit positif.

Ce Droit positif n’est pas universel, puisqu’il dépend des situations historiques, sociales qui président aux destinées des membres de la communauté visée. Il est par contre concret, c’est-à-dire qu’il s’applique concrètement aux actions des individus et permet de juger de leur conformité à la règle, ou à la norme. Il est d’ailleurs susceptible d’être amendé, modifié, en fonction notamment de la jurisprudence. Celle-ci consiste en l’adaptation des règles du Droit général et des Lois aux cas particuliers. Aucun règlement ne pouvant comprendre par avance tous les cas de figure possibles, toutes les situations qui peuvent se présenter, il est nécessaire d’adapter les lois, de les interpréter, pour les faire correspondre aux situations réelles. Ainsi

Si les Lois doivent être générales pour respecter une égalité entre les citoyens, et pour pouvoir couvrir les différents champs d’action des individus, elles doivent être modulées pour s’appliquer aux cas particuliers. L’interprétation de la Loi est le fait du juge (et non du Prince) et constitue ce que l’on nomme la jurisprudence, c’est-à-dire un ensemble d’interprétations particulières dans l’application des lois à des cas particuliers qui permettent ensuite de respecter pour les mêmes situations, une même interprétation. La jurisprudence permet une équité dans les jugements concrets.

On le voit, l’application des Lois peut conduire à une interprétation, une variété dans l’effectivité concrète des jugements. Elles doivent cependant respecter l’esprit des règles, conserver une distance minimale avec les principes édictés à l’origine et remises à jour par les instances juridiques.

Donc les lois concrètes reposent sur le Droit positif qui est fonction de la société et de son évolution. Mais alors le droit serait en lui-même relatif, non seulement relatif dans ses conditions d’application, mais relatif géographiquement et historiquement. C’est ce que Pascal souligne quand il affirme dans ses Pensées : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà. Plaisante justice qu’une rivière borne. » En effet, la justice ne vise-t-elle pas à être la même pour tous, à être basée sur une idée universelle de la vérité qu’elle devrait alors appliquer légitimement ? La relativité des Lois positives conduit à s’interroger sur leur légitimité ! D’où vient cette légitimité et sur quels critères se fonde-t-elle ?

Si l’on postule que la variété des lois positives empêche de leur conférer une légitimité universelle, on se place d’ores-et-déjà dans la perspective d’un Droit naturel, c’est-à-dire d’un Droit qui serait universel et dont chaque législation serait l’imitation plus ou moins fidèle, plus ou moins légitime.

 

Le Droit naturel aurait des caractéristiques opposées au droit positif, il serait ainsi universel et non relatif aux sociétés historiques, il serait immuable et non changeant et évolutif.

Le fondement du Droit naturel peut être dans la Nature : pour les Anciens, il correspond aux lois de la nature elle-même telles qu’on peut les observer autour de nous. Il est évident que cette conception implique que ces lois soient d’origine divine, ou pour le moins qu’un ordre cosmique (ou l’ordre de la Cité de Dieu) puisse fournir le modèle d’un ordre social. Les lois positives devraient respecter l’ordre naturel des choses et donc permettre à chacun d’occuper la place qui lui revient naturellement.

Se pose ici notamment le problème de la légitimation naturelle des différences sociales ! En effet, si l’on fonde le Droit du Souverain sur la Nature ou sur Dieu, il paraît clair que toute contestation de l’ordre social est interdite légitimement. On aboutit donc à valider par ce Droit naturel un état de fait social et historique de manière artificielle !

Au contraire, le fondement du Droit naturel peut être dans l'homme (la nature humaine). Si l'on enracine le Droit dans l'homme, on cherche alors à s'appuyer sur ce qu'il y a d'universel en lui : la Raison et le Liberté. Ces deux caractéristiques universelles de l'humanité vont servir de fondement aux lois que l'on veut le plus conformes possible au Droit naturel. C’est par la découverte en l’homme d’une exigence morale que l’on fonde le Droit naturel, c'est notamment la thèse du philosophe des Lumières allemandes, Emmanuel Kant (1724-1804). La Raison permet de découvrir les règles de cette morale, d’en formuler les maximes qui présideront à mon action. La Raison pratique se fait donc l’intermédiaire entre les exigences absolues de la morale et du Droit transcendant, pour fonder un Droit positif réglé sur ces exigences.

On peut identifier parmi ces exigences morales des exigences universelles que nous retrouvons dans les Droits de l'Homme : la liberté et l'égalité. En effet, la loi de la Raison nous oblige à considérer chacun comme porteur des mêmes droits, de la même dignité humaine. Celle-ci fonde un droit à être traité également, équitablement.

Ainsi nous apparaît légitime une loi qui serait fondée sur le Droit naturel et donc qui les prendrait à la fois pour modèle et pour but ! L'élaboration des Droits de l'homme est ainsi une tentative pour faire correspondre ce Droit naturel universel avec la législation positive des Etats. Mais ceux-ci suffisent-ils à assurer l'égalité et la dignité de tous ?

 

b) Les Droits de l'homme suffisent-ils à établir la justice ?

Nous l’avons vu, la loi constitue l’espace de la société civile qui articule les libertés de chacun avec celles des autres. C’est la théorie que défendent les philosophes du Contrat social, à la manière de Rousseau ou de Hobbes. La Société civile est la société moderne et libérale ; le droit qui y a cours est le Droit positif. Mais ce Droit prétend être fondé sur un Droit naturel, un Droit universel, qui n’est plus simplement le Droit divin, mais un Droit sédentarisé : les Droits de l’Homme.

S’inspirant des philosophes des Lumières, les déclarations concrètes et historiques dans le champ politique, ont tenté de transposer dans le Droit positif, ces idées universelles basées sur l’universalité de la Raison et de l’Humanité. L’exemple de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 représente ainsi pour nous une telle mise en œuvre de cette conception du Droit naturel.

Il s'agit d'établir de grands principes applicables à tous les citoyens, et aujourd'hui à tous les citoyens des pays ayant signé cette Déclaration. Ces principes constituent des droits essentiels sans lesquels on estime que la liberté et la justice ne sont pas respectés. Ainsi le droit instaure l'égalité de tous devant la loi, la liberté de chacun dans le cadre de cette loi, et le respect des droits et notamment du droit de propriété. L'Etat de droit qui découle de l'application de ces grands principes est jugé suffisant pour assurer à la société civile suffisamment de garanties politiques et économiques pour assurer son bien-être.

Pourtant, on remarque d’emblée que ce Droit à une histoire, qu’il est né à un moment de cette histoire et dans certains endroits, non dans d’autres. Serait-il un droit relatif dont on prétend l’universalité par simple ethnocentrisme ? Le Droit naturel dont s’autorisent les Droits de l’Homme n’est-il ainsi que le Droit correspondant à l’organisation de la société civile, le Droit tel qu’il s’est imposé dans la société moderne et tel qu’il tend à s’étendre à toute société adoptant ce modèle. L’universalité des Droits de l’Homme n’est-elle pas simplement alors l’expression de le domination européenne et capitaliste dans le monde ?

C’est ce que pense Marx quand il élabore sa critique des Droits de l’Homme.

Il s’agit donc de faire la critique de la prétention à l’universalité de ces Droits que l’on ne trouve pas partout, même s’il faut bien reconnaitre qu’ils sont peu à peu adoptés par tous les pays. L’extension de cette conception du Droit correspondrait à celle de la société bourgeoise comme forme historique du capitalisme et comme forme de la domination économique. En réalité, ces Droits sont ceux de l’homo oeconomicus, c’est-à-dire de cette humanité telle que l’ont définie les penseurs libéraux (depuis Hobbes, jusqu’au utilitaristes et aux néo-libéraux actuels). L’homo oeconomicus est un individu calculateur, qui  pèse ses avantages individuels et mesure les avantages et inconvénients avant que de se déterminer. C’est l’individu isolé dont parle Marx, un individu dont la liberté est avant tout celle d’entreprendre ! Cette liberté se concrétise en liberté de dominer autrui, de prendre l’ascendant économique grâce à la possession des moyens de production, d’exploiter la force de travail de l’autre. C'est ce que dénoncent notamment les marxistes.

Karl Marx, La question juive (1844)

La liberté dont jouissent les exploités est une liberté théorique, puisqu’elle ne peut se réaliser faute de moyens et d’espace social pour le faire.

Si l’on cherche l’origine de cette inadéquation de la liberté civile à la réalisation des hommes, il faut sans doute la chercher du côté de son inefficacité à préserver, établir ou favoriser une égalité de pouvoir. Sans égalité concrète de pouvoir, impossible de profiter de cette liberté offerte par les Droits de l’Homme. L’exploité, celui qui subit les inégalités sociales, est bien théoriquement libre et égal, mais il ne l’est pas concrètement. On pourrait affirmer que la liberté ainsi définie ne serait pas une liberté légitime en ce qu’elle ne permettrait pas un exercice réel et équitable des droits. C'est ce que remarquent aujourd'hui par exemple ceux et celles qui travaillent sur l'empowerment, c'est-à-dire la problématique du droit du point de vue des pouvoirs dans le contexte américain d'une discrimination notamment raciale : comment donner à tous et à chacun le pouvoir réel d'exercer ses droits ? Il nous semble ici que nous pouvons aborder cette nouvelle problématique sous l'angle particulier de la justice sociale.

 

c) La justice permet-elle de réduire les inégalités ?

Si l’on rejette tout fondement transcendant à la Justice et à la loi, il faut alors comprendre la légitimité en termes pratiques. Il s’agit alors d’élaborer une éthique : c’est-à-dire des règles concrètes de comportement, des lois pratiques qui permettent le compromis, l’entente et l’équité. C’est ainsi qu’Aristote aborde la question de la Justice dans son Ethique à Nicomaque.

Aristote, Ethique à Nicomaque (IVe s. av. JC)

Pour Aristote, la justice est ainsi une vertu, une vertu qui a cours dans la relation avec autrui. C’est une vertu de l’échange et de l’équilibre des échanges. Elle est ainsi liée à l’équilibre politique de la Cité. En effet, elle permet d’organiser les hiérarchies et de récompenser les mérites, mais elle permet aussi de régler les échanges et les affaires de Justice…

Aristote distingue ainsi la justice distributive, celle qui attribue à chacun selon ses mérites, en proportion de ce qu’il apporte à la société, de la justice réparatrice (rectificative, corrective…) qui s'efforce de corriger les inégalités entre des individus considérés comme égaux.

La justice distributive est la répartition des biens et des honneurs dans le sens d'une équité, c'est-à-dire d'une égalité entre les personnes de même dignité. Ce n'est pas l'applicatoin stricte d'une règle d'égalité. Il s'agit d'assurer l'équité dans la relation aux autres. Mais cette justice ne corrige pas les inégalités, au contraire, elle les valide.

Ce n'est que lorsque l'on applique une justice corrective que l'on vise l'égalité entre des individus considérés comme égaux mais qui ont subi un tort, ou au contraire on eu un avantage sur d'autres.

Nous voyons dans ce sens que la justice est donc une vertu politique, qui s'établit dans le vivre-ensemble ou l'intersubjectivité.

La distinction d'Aristote nous conduit à relever une tension entre deux exigences de justice concurrentes : en effet, la justice est une tension entre l'exigence de reconnaissance des particularismes, des mérites, de l'identité et de la valeur de chacun, et l'exigence d'égalité de droit entre ceux qui appartiennent à une même humanité. Peut-on simplement dissocier ces deux domaines de la justice ? N’est-il pas difficile de ne pas les mettre en concurrence ?

Comment réguler cette tension ? Aristote nous indique ce que serait une justice comme moyen terme entre deux injustices, mais ne nous retrouvons nous pas avec plutôt une absence de justice doublée d’un excès de pouvoir ? La justice ne peut en effet pas consister en l’acception d’une inégalité naturelle ou sociale, et en sa confirmation dans la répartition des correctifs. Corriger les inégalités, n’est-ce pas en prendre acte et renoncer à toute transformation durable ?

 

Si l’on admet que la société est hiérarchisée et que les inégalités de nature, mais aussi les inégalités de mérite, de don ou encore d’origine, permettent son organisation rationnelle et efficace, il faut bien admettre une forme d’inégalité irréductible. Mais alors, comment éviter que cette inégalité constatée dans l’organisation politique ne mette en péril l’unité de la société elle-même ? Comment s’assurer que les plus faibles y trouvent tout de même leur avantage, leur place et, lorsqu’ils sont menacés, leur recours ?

C’est à cette question que l’on peut répondre en tentant d’établir une notion de Justice qui ne soit pas celle de la stricte égalité, mais qui tende à l’égalisation des conditions, si ce n’est celle des positions sociales. C’est la solution libérale telle que peut la présenter John Rawls : il faut remplacer la justice comme EGALITE, par la justice comme EQUITE. C’est-à-dire une justice qui serait de permettre d’une part à chacun d’accéder à toutes les positions sociales, de garantir la mobilité sociale, et que les inégalités ainsi tolérées le soient quand elles profitent  à chacun, et notamment aux plus déshérités. Cette conception de la Justice comme justice corrective et comme justice d’accès aux fonctions, veut laisser la place à la liberté de chacun, liberté d’entreprendre ou de prétendre à une place plus ou moins importante dans la société, et compenser les inégalités qui découlent de ce choix par un système de prestations sociales correctives, d’imposition des plus favorisés pour aider les moins favorisés.

Egalité / Equité

EGALITE VS EQUITE

 

John Rawls (1921-2002) est un philosophe américain dont l’œuvre majeure, A Theory of Justice, est la référence dans le monde anglo-saxon quand il s’agit de questions morales et économiques. Sa conception de la Justice entend réconcilier les exigences de Liberté et d’Egalité. Pour Rawls, des inégalités légales peuvent être justes si elles remplissent ces conditions : le droit doit permettre de maximiser les libertés de chacun en respectant l'égalité de tous ; les inégalités sociales et économiques ne doivent être tolérées que si elles profitent à tous, notamment aux plus défavorisés ; chacun doit avoir le droit de prétendre à toutes les positions sociales en fonction de son mérite.

John Rawls, Théorie de la Justice (1971)

Il établit ces principes à partir d’une expérience de pensée, l’hypothèse du « voile d’ignorance », selon laquelle n’importe quel être rationnel devant choisir un système économique et politique avant de s’y intégrer, sans connaitre sa place future, opterait pour ce type de système.

Il ne s’agit pas en tout état de cause, d’assurer une égalité réelle entre les participants d’une communauté, mais simplement une égalité relative. La mise en place et la justification de dispositifs correctifs (l’équivalent des systèmes de protection sociale, de compensation et de discrimination positive) est de cet ordre. On prend acte des inégalités qui résultent des différences irréductibles entre les hommes (différences de capacités, de culture ou de motivation) qui sont l’expression de leur liberté (liberté de s’affirmer et de prétendre à une position sociale). Il y a, à la base de la société selon Rawls, un principe de différenciation qui ne peut être nié et que l’on ne peut annuler sans porter atteinte aux libertés essentielles. Au contraire, on doit en accueillir la fécondité si l’on ne veut tomber dans ce que Alexis de Tocqueville (1805-1859) (dont les travaux portaient sur la Révolution française et sur l’avènement de la démocratie), dans De la démocratie en Amérique, identifiait comme le danger des démocraties : « la passion pour l’égalité ». C’est au nom de cette passion que l’on sacrifie la liberté individuelle.

On le voit, la pensée libérale constate une tension dans la société entre la liberté et l’égalité. Elle propose de remplacer cette idée de liberté par celle d’équité : il s’agit de traiter équitablement chacun et de permettre pour tous la maximisation de la liberté et de la justice, et de remplacer l’exigence d’égalité par celle d’une égalité des chances et d’un principe de différence. La justice serait alors le mode pratique de compensation et d’harmonisation de ces différentes exigences, hiérarchisées (puisque celle de liberté est toujours première) et ordonnées dans un processus.

Pourtant, il faut bien reconnaître que cette conception a des difficultés à s’imposer. Il s’agit bien d’un point de vue théorique, rationnel, qui ne prend pas suffisamment sans doute en compte la réalité de ses effets. Comment en effet construire une société basée sur le mérite et sur l’égalité des chances alors que les inégalités sociales empêchent l'exercice des droits reconnus à chacun ? L'intervention sociale en vue de la réduction des inégalités semble bien abandonner l'objectif d'une égalité réelle entre les citoyens.

 

C’est pourquoi, on peut se demander si la notion de justice peut être un moyen efficace de protéger les plus faibles, d’assurer leur bonheur. La justice n’est-elle pas finalement toujours du côté du pouvoir, même si elle peut envisager des compensations à la domination (prestations sociales, aides…) quand cela paraît nécessaire. N’est-il pas illusoire de compter sur la Justice pour changer les relations sociales ?

C’est la question du rôle finalement de la Justice réelle qui est posé : la Justice est-elle de grands principes universels et rationnels auxquels on pourrait se référer pour améliorer la situation des plus déshérités, des plus pauvres, pour lutter contre les inégalités ? Ou la justice réelle n'est-elle pas avant tout une question de pouvoir ?

C'est notamment la question que se posent Noam Chomsky (linguiste américain et penseur critique de la société américaine) et Michel Foucault (philosophe français dont un des objets d'étude est la question du pouvoir) dans un entretien de 1974.

On peut considérer la Justice comme l'établissement rationnel de grands principes de vie en commun, de principes d'égalité et d'équité, dont la juridiction positive, les lois réelles ne seraient que le reflet imparfait. Il s'agit alors pour Noam Chomsky de s'appuyer sur ce qu'il y a de bon dans le Droit positif pour renforcer les droits des classes défavorisées. Mais on peut aussi considérer comme Michel Foucault, que la justice réelle n'est que le reflet de rapports sociaux et de rapports de pouvoir. La question ne se pose plus alors d'améliorer la Justice en s'appuyant sur des principes universels, mais de changer les rapports de pouvoir, les rapports de force pour changer la Justice. On retrouve cette interrogation aujourd'hui dans la sociologie américaine qui met en avant la question de l'empowerment : comment rendre tous les citoyens, et notamment les défavorisés et ceux qui subissent des discriminations (notamment des discriminations raciales), capables d'exercer leurs droits ?

 

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La Justice nous est apparue comme un idéal qui oriente notre vie en société et nos conceptions politiques. Cependant, le problème se pose de son application dans la société réelle, une société parcourue d'inégalités et de conflits. Comment assurer la justice et la liberté pour tous alors que l'égalité n'est pas établie ? Il faut donc nous interroger sur les moyens dont dispose la politique pour permettre à tous les citoyens d'exercer leurs droits, de vivre leur liberté et sans doute d'accéder au Bonheur. Peut-on définir le bonheur en société à partir de cette question de la justice et de la liberté ?

 

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